Gabon : nomination contestée d’une non-magistrate au Tribunal d’Oyem

Une décision du Conseil supérieur de la magistrature (CSM), réuni le 12 septembre 2025 sous la présidence du chef de l’État, Brice Clotaire Oligui Nguema, suscite une vive polémique dans le milieu judiciaire. Selon une révélation du média spécialisé La Presse judiciaire publiée le 17 septembre, Islande Ornella Zang Nze a été nommée juge au Tribunal de première instance (TPI) d’Oyem, alors qu’elle ne possède pas le statut de magistrat.
Une nomination qui interroge la légalité
Cette promotion insolite suscite de vives réactions parmi les professionnels du droit. La désignation d’une personne extérieure au corps judiciaire apparaît en effet comme une entorse majeure aux textes organiques qui encadrent l’accès à la magistrature.
Les articles 15 et suivants de la loi organique n° 001/2012 précisent clairement que seuls les titulaires d’un diplôme de l’École nationale de la magistrature (ENM), ou ceux admis exceptionnellement après un concours sélectif, peuvent rejoindre la magistrature.
Or, plusieurs sources judiciaires confirment qu’Ornella Zang Nze n’apparaît dans aucun tableau d’avancement de l’ENM, ni dans les procès-verbaux des promotions récentes.
Vérifications et zone d’ombre
Selon La Presse judiciaire, des vérifications auprès de la direction générale de l’ENM indiquent que la nouvelle juge d’Oyem n’a jamais fait partie des promotions régulières. Des magistrats, sous anonymat, ajoutent qu’elle était absente de la session 2023 issue du concours de 2021.
Ces éléments confortent l’idée qu’elle n’aurait jamais appartenu au corps des magistrats. L’intéressée aurait pourtant tenté sa chance : « elle avait bien tenté ce concours en 2021, obtenant 10,20/20 au premier tour, elle avait été recalée aux épreuves orales. En 2024, elle s’était plutôt tournée vers le concours d’entrée à l’ENA. Parallèlement, elle exerce aujourd’hui comme clerc au cabinet d’huissier Minko Mi Abo, à Libreville, en préparation du concours d’huissier de justice », détaille une source citée.
Le risque d’un précédent dangereux
Ces révélations font planer le doute sur la procédure de nomination validée au plus haut sommet de l’État. Certains observateurs redoutent que le président de la République ait été mal informé. Pour de nombreux magistrats, cette situation alimente un climat de méfiance à un moment où la justice devait être érigée en pilier du « nouveau Gabon ».
Face aux interrogations grandissantes, la tutelle judiciaire est désormais attendue pour clarifier les conditions de cette nomination.