Politique

Alain-Claude Bilie-By-Nze sur ses comptes de campagne : « Je ne les déposerai pas »

Le 25 juin 2025, Alain-Claude Bilie-By-Nze, vêtu d’une cravate ajustée et avec un discours aussi tranchant que son regard d’ancien Premier ministre, lançait à Libreville la campagne d’adhésion à son nouveau parti Ensemble Pour le Gabon (EPG). Son objectif : atteindre les 12 000 adhérents nécessaires selon la législation en vigueur pour les partis politiques. Le tout orchestré de manière impeccable : bien préparée, bien médiatisée, et avec un message politique clair.

Cependant, lors de cet événement, une question dérangeante a perturbé l’ambiance : « Avez-vous déposé vos comptes de campagne ? » Et c’est avec un ton ferme, presque militaire, qu’Alain-Claude Bilie-By-Nze a répondu : « Je n’ai pas déposé mes comptes de campagne et je ne les déposerai pas. »

La loi ? Non merci, je suis opposant.

Il semble que pour certains, certaines lois ne soient applicables qu’à ceux considérés comme candidats secondaires. Tandis que la Cour des comptes rappelait une dernière fois l’obligation pour les candidats à la présidentielle de rendre compte de leurs finances avant le 25 juin, Bilie-By-Nze, lui, affirmait une interprétation personnelle du droit : « Cette disposition est anti-constitutionnelle. La Cour des comptes ne contrôle que les fonds publics. » Autrement dit : « Je n’ai pas reçu d’argent public, donc je n’ai de compte à rendre à personne. »

Un raisonnement qui semble logique pour ceux qui estiment que le financement des campagnes politiques privées peut se faire dans l’opacité, sans surveillance, sans obligation de transparence. Une vision selon laquelle démocratie et impunité seraient compatibles.

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L’ancien ministre devenu militant

L’ironie est frappante. Voici un homme qui a occupé les plus hautes fonctions sous le régime Bongo : ministre, puis Premier ministre, et fervent défenseur de l’État de droit. Mais dès qu’il se retrouve dans l’opposition, il découvre soudainement les avantages d’un refus de se conformer à certaines règles. Lui qui appelait les autres à la rigueur et à la transparence lorsqu’il était au pouvoir, se trouve aujourd’hui à rejeter des lois qu’il juge injustes, dès qu’elles ne lui conviennent plus.

Dans ce pays, l’opposition semble parfois être le manteau parfait pour oublier son passé, se réinventer une image politique propre et surtout, éviter d’assumer des responsabilités financières et morales.

Des adhésions pour exister, mais aucun compte à rendre

EPG cherche à séduire, à rassembler et à peser sur la scène politique. Bilie veut s’imposer politiquement, et il sait que cela passe par des chiffres : atteindre les 12 000 adhérents ou risquer l’interdiction. Il se conforme donc à cette loi, mais pour ce qui est des comptes de campagne, il se montre catégorique. Il invoque la Constitution comme un joker juridique, oubliant que l’on ne peut pas ignorer une règle simplement parce qu’elle dérange. En réalité, cette posture révèle une pratique bien ancrée dans le paysage politique gabonais : le respect sélectif des lois, selon les intérêts du moment.

Analyse politique : le retour du caméléon

Alain-Claude Bilie-By-Nze n’est pas un débutant en politique. Il connaît parfaitement les mécanismes du pouvoir. Habile orateur, il sait comment se positionner face aux institutions et flatter les médias. Sa posture de dissident pourrait séduire un électorat frustré par des années de compromissions politiques. Mais derrière cette bravade se cache une fuite face à une exigence fondamentale dans toute démocratie : la transparence électorale. Si Bilie-By-Nze refuse de rendre des comptes aujourd’hui, comment pourra-t-il en rendre demain, s’il accède au pouvoir ?

Et si l’adhésion aux lois était plus importante que l’adhésion des militants ?

Alors que certains peinent à rassembler leurs troupes, Bilie-By-Nze s’oppose frontalement aux institutions. Il souhaite diriger un parti politique neuf, mais il semble déjà recycler les anciens réflexes d’impunité. On peut rêver d’un Gabon nouveau, mais encore faut-il commencer par respecter les règles en vigueur.


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